Me revoilà assez vite pour une nouvelle semaine. Bon il s’est passé pas mal de choses, je me concentrerai donc sur les derniers jours. En effet le Mont Athos vaut bien toute la place parmi les mots qui vont suivre.
Commençons par le début. C’est quoi le Mont Athos ?
« La communauté monastique du Mont Athos trouve dans le nord de la Grèce, sur la péninsule du mont Athos, appelée Aktè, en Chalcidique. »
« Sur le plan juridique, cette communauté autonome réunit vingt monastères et les différents villages et maisons qui en dépendent. Ils abritent environ 2 000 moines orthodoxes grecs, bulgares, roumains, russes, serbes et autres, qui mènent une vie de réclusion, d'introspection et de prière. »
« Sur le plan politique et administratif, le ministère des Affaires étrangères grec traite les questions relatives à la presqu'île, territoire grec, mais où s'appliquent des lois différentes, compatibles avec l’abaton : cette différence est constitutionnellement garantie. »
« Sur le plan canonique, les vingt monastères sont « stavropégiaques », c'est-à-dire exempts : ils échappent à l'autorité de l'évêque local et sont placés directement sous la seule responsabilité épiscopale de l'archevêque de Constantinople et patriarche œcuménique. »
Enfin, « sur le plan territorial, le siège du synode se trouve être la petite bourgade de Karyès en est le centre administratif : on y trouve des laïcs au service de la communauté. C'est la seule localité de Grèce où, conformément à l’abaton, il n'y a aucune femme. »
Pour finir avec les infos tirées de Wikipedia, on peut rajouter que « depuis 1988, la communauté monastique du mont Athos est inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO : cette inscription inclut le territoire, les constructions, leur contenu (dont les œuvres d'art et les très anciennes bibliothèques des monastères) et le patrimoine immatériel (gestes artistiques, chants, art de l'icône…). »
Avant d’attaquer les quelques réflexions qui ont émergés de mon passage là bas, voici les 3 monastères que j’ai pu visiter et, où j’ai passé la nuit.
Le monastère de Xenophontos.
(16e place dans le classement hiérarchique des monastères de la montagne sainte).
Le Saint Monastère est construit en bord de mer, entre les monastères et Docheiariou Saint-Panteleimon, sur le flanc ouest du mont Athos et est dédiée à Saint-Georges. Il possède 14 chapelles, dont huit sont dans le monastère. Première mention du monastère était dans le dernier quart du 11e siècle.
La période de prospérité interrompue par la chute de Constantinople (1453), puis les catastrophes successives et reconstruite grâce aux dons des dirigeants des pays.
Le monastère de Koutloumousiou.
(6e place dans le classement hiérarchique des monastères de la montagne sainte).
Le monastère cénobitique de Koutloumousiou est situé à 10 mn de Karyès, à flanc de colline dans un cadre de verdure. Dédié à la Transfiguration du Sauveur, on date la fondation du monastère entre le Xe et le XIIe siècle mais c’est au XIVe siècle que l’abbé Chariton d'Imvros à décidé de l'agrandir lorsqu’il connaît une grande prospérité marquée par l'afflux de moines roumains.
Le katholikon (1540) est à 5 coupoles et possède des fresques de l'école crétoise (XVIe siècle) ayant malheureusement subi de nombreux repeints. On remarquera l'iconostase de bois sculpté, ornée de diverses représentations. Intégrée au bâtiment à gauche du narthex, la chapelle de la Fovera-Prostassia (1733) abrite l'icône miraculeuse de la Vierge qui porte le même nom. Autour de la cour, on trouve le réfectoire (XVIIIe siècle), la tour du clocher (1808) et la phiale (1813). La bibliothèque du monastère abrite plus de 600 manuscrits dont de nombreux illuminés, d’importantes archives historiques et un grand nombre de vieux livres imprimés.
Le monastère de Xeropotamou.
(8e place dans le classement hiérarchique des monastères de la montagne sainte).
C’est le premier monastère que le pèlerin rencontre, en parcourant le port de Daphné jusqu’ à la capitale du Mont Athos Karyes, un monastère des plus anciens dans Athos, dédié aux Saints Quarante Martyrs.
La fondation du monastère était à la fin du 10ème siècle par le moine Paul Xeropotaminos, un contemporain de saint Athanase de Mont Athos. Quand en 1280, presque tous les bâtiments du monastère ont été enveloppés par les flammes, l’empereur Andronic II Paléologue (1282-1328) a alloué des ressources financières pour reconstruire le monastère et offert des dons importants. En outre, le 14ème et 15ème siècle les rois de Serbie offert de grosses sommes d’argent pour le monastère.
Ceci étant dit, passons au reste.
Il faut bien reconnaître à cet endroit son quelque chose, son truc. Et comme vous pouvez l’imaginer, il a laissé sa petite trace dans ma tête et mon esprit. Quelques réflexions sont apparues avec mon séjour là-bas et pourtant je n’y suis resté que 3 jours pleins, le 4eme ayant été celui de mon retour à la civilisation… par là, je veux dire le monde.
Parce que c’est un endroit qui est coupé du reste. Par ses règles, sa vocation, sa topographie, tous ses monastères. Il y a vraiment cette idée d’être autre part.
Déjà on y accède en bateau. Il y a donc cette phase de transition où l’on monte sur le pont, où la vitesse crée les vagues pour un voyage ou l’on quitte le port pour débarquer sur ce bout de terre. Les gens qui nous entourent lors de cette transition sont tous là pour des raisons religieuses. Les bâtons de pèlerins, les moines et prêtres orthodoxes avec leur drapé noir, les chapelets aux poignets, … tout cela participe à donner une couleur à ce petit périple qui semble voguer vers un nouveau monde. Ainsi l’eau devient le vecteur pour passer à cet autre monde qui tient sa roche et ses montagnes depuis un temps qui semble éternel.
Lorsque j’y étais, j’ai eu le temps de perdre mon regard - et mes réflexions - dans la mer qui venait perdre ses vagues aux abords du rivage. Ce fut le cas lors de mon premier monastère, l’aplomb de ses hauts murs barbotant presque dans les écumes rejetées par les courants marins. De là sont sortis plusieurs réflexions. Je m’en vais vous en partager une ici… peut être qu’elle manque son aboutissement mais je déroule quand même.
LA CRÉATION EST UN MIROIR DE L’ESPÉRANCE… DIEU JOUERAIT-IL AU PETIT POUCET AVEC NOUS ?
Cela a à voir avec l’horizon de la mer. Je m’explique.
Quand j’étais assis sur les rochers sur le rivage, il y avait quelques cailloux - et de gros dans le lot - sur lesquels la course des vagues prenaient fin. L’eau emporté par la fin de course du courant passait par dessus la roche émergée, épousant les contours patiné par l’eau salé. De tout près, il y avait comme une lutte, quelque chose d’agité, de brusque parfois entre ce liquide et ces solides.
Puis on en déportant mon regard au loin, le mouvement de la surface de l’eau semblait d’atténuer. La surface bleutée comptait bien ses zébrures : parfois même avec de petites vagues. Mais plus j’allais regarder au loin, plus le tout s’adoucissait. Et puis au fond du loin, l’horizon maritime avait l’air d’être d’un calme plat.
Tout ça pour dire quoi ?
Qu’à mon sens, cette description - très personnelle, je le reconnais - semble incarner nos vies et la perception des difficultés que l’on y rencontre. Je pourrais prendre comme image de comparaison l’adage qui dit que « après la pluie vient le beau temps » ou celui de la tempête et du calme. Même si ce sont des fenêtres que l’on a trop ouvertes, il y a néanmoins un fond de vrai. Je ne serai dire si ces phrases nous viennent vraiment de nos anciens - et de leur sagesse - ou si elles sont tout aussi apocryphes que récentes.
Malgré tout, il y a à mon sens ici, cette idée que la Création - ici, la mer et son horizon - nous indique qu’il faut regarder plus loin que les difficultés immédiates. Cela donne l’espérance d’un prochain plus facile. C’est aussi l’idée de prendre du recul sur ce qui nous pèse dans l’instant. De relativiser. De mettre en balance les choses. Comme une respiration profonde qui permet de passer outre.
Ainsi Dieu nous indique peut être à travers sa Création la marche à suivre pour continuer d’avancer. De garder la tête hors de l’eau, de poser les pieds l’un après l’autre afin de progresser continuellement sans être submerger par une situation qui nous dépasserait.
J’aime l’idée que Dieu nous laisse par sa Création des petites cailloux blancs pour trouver notre chemin - et donc le sien par extension. À la manière des vitraux des cathédrales gothiques et des chapiteaux des colonnes romanes, il y a toujours eu cette idée de créer des livres de verre ou de pierre pour que le peuple s’instruise. Pour qu’il comprenne les choses de Dieu par ses sens, afin de faire sourdre des questions, des réflexions, une progression dans la foi et la relation au Père des cieux.
La Nature est le livre de Dieu. On parle parfois de cathédrales de verdure. Il y a cette idée du bâtisseur divin, du grand architecte qui a lancé pour l’Homme un monde à sa mesure, à sa proportion. Les anciens bâtisseurs l’avaient bien compris : le nombre d’or, la corde à 13 noeuds… étaient des outils pour garder l’Homme dans des pierres à sa mesure. Il y a ce truc de progression et d’énergie pour régénérer l’Homme. C’est notamment pour cela que les églises romanes étaient construites sur des sources telluriques.
Dieu a initié cela : par ce qu’il a créé, il donne la possibilité à l’Homme de percevoir ses enseignements et la manière de progresser dans sa vie. La Nature devient alors une notice pour celui qui s’y penche un peu, afin de comprendre la piste des cailloux blancs que la main providentielle a laissé pour nous.
Je ne sais pas encore si cette réflexion est aboutie ou non, je crois qu’elle demande à prendre sa place dans une discussion afin d’en explorer - par le regard d’un autre - ses confins. Affaire à suivre donc…
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